Bocages à reconstruire

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Claude
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Bocages à reconstruire

Message par Claude » 06 mai 2019, 10:20

Il faut reconstruire une partie des bocages détruits
lors des remembrements.

Voici le point sur cette question publié par Le Monde dans son excellente rubrique Planète et Des Solutions pour la Planète.

Ce copié-collé ne peut offrir tous les liens de l’article original auquel on accède en cliquant sur ce lien : https://www.lemonde.fr/planete/article/ ... _3244.html

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Il PLANÈTE
DES SOLUTIONS POUR LA PLANÈTE

Après des décennies de remembrement, la Bretagne mise de nouveau sur son bocage

Devenus des symboles culturels et historiques de l’évolution de l’agriculture, les talus sont reconstruits dans la région pour limiter l’érosion des sols et la pollution des eaux.

Par Simon Auffret Publié le 03 mai 2019 à 02h32 - Mis à jour le 04 mai 2019 à 08h58
Temps de Lecture 4 min.

Des solutions pour la planète. Il a suffi de quinze jours de travaux, en février, pour qu’Alexandre Boudric, 24 ans, fasse faire à son exploitation un premier pas vers la reconstitution d’un paysage de bocage que ses grands-parents sont les derniers à avoir vu de leurs yeux.

La butte de 800 mètres de long, tout juste installée autour de l’un des champs de son exploitation maraîchère à Plouguiel (Côtes-d’Armor), est en effet un marqueur central de l’agriculture traditionnelle bretonne. Celle-ci s’est longtemps distinguée par une campagne constituée de parcelles de petites tailles divisées par des haies et des talus boisés, ces séparations surélevées aménagées en terre ou en pierre.

L’aménagement effectué chez ce maraîcher fait figure d’exception en Bretagne, où 220 000 kilomètres de ce linéaire bocager ont été rasés rien qu’entre 1964 et 1994, et dont la disparition se poursuit, depuis, à un rythme soutenu. Un remembrement qui a longtemps été favorisé par l’Etat et les collectivités dans une Bretagne désireuse, dès la fin de la seconde guerre mondiale, de moderniser à marche forcée son agriculture, quitte à détruire un paysage semi-naturel travaillé par l’homme à partir du XIVe siècle.

« On a payé pour détruire, on paye pour reconstruire », lance Mael Spinnec, technicien du syndicat des bassins versants (territoires drainés par un cours d’eau et ses affluents) du Jaudy-Guindy-Bizien, garant de la qualité de ces trois cours d’eau se jetant dans la Manche, entre Lannion et Paimpol. En Bretagne, les syndicats des bassins versants sont les seuls responsables du programme Breizh Bocage, alimenté par l’ensemble des collectivités et le Fonds européen de développement régional pour permettre la reconstruction de centaines de kilomètres de talus.

3 500 kilomètres de nouveaux talus

Depuis 2008, l’ensemble des syndicats de bassins versants de la région a négocié avec les agriculteurs l’implantation de plus de 3 500 kilomètres de nouveaux talus, avec comme argument principal la reconquête de la qualité de l’eau : en ralentissant le ruissellement des pluies sur des terrains en pente, les talus limitent l’érosion des sols ainsi que les dégâts causés par la fuite des produits phytosanitaires – dont certains actifs sont captés par les racines des arbres plantés en bordure des champs. Ils constituent par ailleurs d’importants couloirs de biodiversité en accueillant de multiples espèces végétales et animales, et servent de refuge au bétail dans de nombreux élevages.

Lire l’analyse : La lente reconquête de la qualité de l’eau en Bretagne


Ancien symbole du partage des terres, longtemps entretenu et exploité pour son bois de chauffage, le bocage breton n’a pu faire face à une mécanisation de l’agriculture peu adaptée aux petites parcelles.

« Mon père avait l’habitude de détruire puis de reconstruire ses talus après chaque passage de moissonneuse », raconte Saïg Jestin, principal animateur de l’association Skol ar c’hleuzioù (« l’école des talus »). Autour de la commune de Pouldouran, dont il a été maire pendant treize ans, l’ancien enseignant répertorie et rénove des talus, dont certains, construits en pierre, datent du début du XIXe siècle. « Aujourd’hui, on continue à détruire plus de talus que l’on en construit », déplore-t-il.

« Chaque parcelle a son histoire »

Bien que de mieux en mieux accepté, l’intérêt écologique et patrimonial des talus ne suffit pas à convaincre une majorité des agriculteurs. « Quand des jeunes reprennent une exploitation remembrée avant leur naissance, prétendre à une reconstruction du bocage ne leur paraît pas forcément naturel », explique Catherine Moret, technicienne du bassin versant de la vallée du Léguer, dans l’ouest des Côtes-

La gestion de la circulation de l’eau fait souvent office de déclencheur : à la suite de plusieurs inondations dans des communes de la vallée du Blavet, dans le Morbihan, le syndicat du bassin versant a rassemblé agriculteurs, élus et riverains pour montrer en quoi la construction de talus pouvait freiner les aléas climatiques. « Des conseils municipaux ont aussi décidé que si des coulées de boue étaient observées après le refus d’un agriculteur d’aménager sa parcelle, alors la commune pouvait lui présenter la facture des dégâts », ajoute Benoît Rolland, président du bassin versant.

En dix ans, la structure a investi 2,2 millions d’euros dans le programme de plantation de Breizh Bocage sur son territoire.

« Un intérêt public sur un terrain privé »

Preuve de l’évolution de l’image du talus, l’empiétement des haies n’est plus déduit de la surface agricole lors du calcul des subventions de la politique agricole commune (PAC) européenne – un élément qui motivait de nombreux agriculteurs à procéder à des destructions. Lors de la constitution de leur plan local d’urbanisme, les communes ont aussi la possibilité de classer les talus pour leur intérêt patrimonial ou écologique, ouvrant aux recours toute demande d’arasement.

Lire notre article de 2012 : Les agriculteurs devront faire plus de place à la biodiversité


A la croisée de nombreuses problématiques de protection de la nature et de la biodiversité, le développement du talus breton ne pourrait désormais passer que par un renouveau de l’intérêt que lui portent les agriculteurs. « Le talus a ceci de particulier qu’il devient un intérêt public sur un terrain privé », analyse Mme Moret : « Les conséquences de cet intérêt sociétal fort ne peuvent reposer entièrement sur l’agriculteur ; on ne peut pas travailler sur sa plantation sans mettre en avant sa gestion et sa valorisation. »

La technicienne participe à la constitution d’un label national pour encourager les agriculteurs à devenir, grâce au bocage, des producteurs durables de bois pour chaufferie. « C’est une erreur de penser que le paysage est figé, conclut-elle. Il n’est pas question de le laisser sous cloche, et encore moins sous perfusion. »

Des solutions pour la planète :
Dérèglement climatique, pollution, effondrement de la biodiversité… Les menaces pesant sur l’avenir de la planète sont nombreuses. Mais les solutions pour faire face à ces défis sont, elles aussi, multiples : ce sont ces initiatives, mises en œuvre en France ou à l’étranger, que Le Monde a choisi de vous raconter lors d’un rendez-vous régulier.

Simon Auffret (Plouguiel (Côtes-d'Armor), envoyé spécial)

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