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Claude
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Phytosanitaires.

Message par Claude » 27 avr. 2019, 10:05

Voici un point d'étape fait par Foucart, journaliste spécialisé du journal Le Monde sur les phytosanitaires,
nom donné officiellement aux fameux pesticides ou biocides.
.
PLANÈTE

Pesticides : des coûts (bien) cachés


CHRONIQUE

auteur
Stéphane Foucart

Quelque 700 millions d’euros d’argent public ont été investis dans la réduction des « phytos », pour un résultat global jusqu’à présent nul.Publié aujourd’hui à 06h16, mis à jour à 08h38 Temps de Lecture 4 min


Chronique.
Ce n’est un secret pour personne : les gouvernements successifs sont, depuis plus de dix ans, incapables de faire baisser le recours aux pesticides dans les campagnes françaises. Rien n’y fait, ni la forte demande sociétale, ni l’accumulation des preuves des risques environnementaux et sanitaires dus au recours excessif aux « phyto », ni même les travaux suggérant qu’une grande part de ce qui est épandu est simplement inutile.

En 2007, au terme du Grenelle de l’environnement, organisé par Nicolas Sarkozy, les pouvoirs publics avaient mis en place le plan Ecophyto, destiné à diviser par deux l’usage des agrotoxiques en dix ans. Cette décennie s’est écoulée ; l’intensité du recours aux pesticides n’a pas été divisée par deux. Non seulement elle n’a pas été divisée par deux, mais elle n’a même pas commencé à faiblir. Et elle n’est même pas restée stable : elle a continué à croître, imperturbablement.

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En 2016, devant l’échec inéluctable, le plan Ecophyto a laissé place au plan Ecophyto II, qui a repoussé l’objectif à 2025. En 2018, un renforcement des outils a été mis en œuvre, et le plan Ecophyto II est devenu plan Ecophyto II +.

La probabilité est cependant forte qu’un nouvel échec se profile. Le ministère de l’agriculture et de l’alimentation devait publier, courant avril, les chiffres officiels de l’année 2017, mais il a prétexté une panne informatique pour surseoir à l’annonce (ce qui est plutôt évocateur de mauvaises statistiques).

La question taboue

Ces échecs répétés peuvent aussi se traduire en termes économiques. Selon un article de synthèse publié en 2017 dans Les Cahiers de l’agriculture par Laurence Guichard (INRA, AgroParisTech, université Paris-Saclay) et plusieurs agronomes et sociologues, le plan Ecophyto a bénéficié de 361 millions d’euros de financement entre 2009 et 2014 – dont un peu plus de la moitié issue de la redevance pour pollution diffuse.

Au total, donc, ce sont sans doute quelque 700 millions d’euros d’argent public qui auront été investis dans la réduction des « phyto », pour un résultat global dont il faut bien dire – à s’en tenir aux chiffres – qu’il est jusqu’à présent nul.

Ce constat pose à nouveau la question – bien plus vaste que le seul financement de ces plans successifs – des « coûts cachés » des pesticides.

C’est ce que les économistes nomment dans leur jargon les « externalités négatives » : combien coûte à la collectivité l’utilisation actuelle de ces produits, en plans de réduction de leurs usages, mais aussi en soins médicaux, en assainissement des eaux, en érosion des services gracieusement offerts par les écosystèmes, voire en frais d’acquisition de connaissances (étudier les effets de ces produits a aussi un coût) ? C’est la question taboue, la question à laquelle il vaut mieux, semble-t-il, ne pas chercher de réponses.

Le Programme prioritaire de recherche (PPR) sur les pesticides qui doit être présenté en juin par la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Frédérique Vidal, n’y répondra donc pas. Et ce n’est pas faute d’une volonté des scientifiques de se colleter avec cette épineuse question.

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Le comité de chercheurs mis en place par l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) pour définir les « défis scientifiques » du programme, avait en effet inclus dans leur document d’orientation la nécessité de « mieux connaître les coûts cachés des pesticides pour aider à réduire leur utilisation ». Ils n’ont pas été écoutés par le ministère.

Estimer le fardeau économique

« Les dommages des pesticides pour la santé et l’environnement, parfois appelés “coûts cachés” des pesticides, concernent le secteur agricole en général, et ses travailleurs (…), écrivaient-ils dans le document d’orientation du PPR. Ainsi, les données épidémiologiques, bien qu’encore très incomplètes, mettent en évidence une surincidence de certaines pathologies chroniques (cancers du sang, de la prostate, maladie de Parkinson) parmi la main-d’œuvre agricole exposée aux pesticides. » D’où des coûts privés (supportés par les malades) et publics (supportés par la Sécurité sociale) induits par le recours aux « phyto ».
Les chercheurs listaient également une variété de ces « coûts cachés » à estimer : érosion de la pollinisation et de la fertilité des sols, dommages sanitaires sur les riverains d’exploitations par pollution de l’air, ou « sur la population générale en raison des résidus de pesticides dans l’alimentation ou dans l’eau ».

« Un premier objectif pour la recherche est de mieux connaître l’ampleur de ces coûts cachés, pour éclairer les choix des décideurs publics visant à les éviter, et, au-delà, pour aider la transition en favorisant la prise de conscience à leur sujet », justifient les auteurs du document.

Le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche n’a pas suivi la volonté des chercheurs de creuser la question. Celle-ci ne figure pas dans les axes retenus pour les appels à projets pouvant bénéficier d’un financement, dans le cadre du PPR. Seule l’organisation d’un colloque est prévue dans le cadre du programme. Rien qui permette, en tout cas, d’estimer le fardeau économique représenté par les « phyto », et de mettre celui-ci en regard des bénéfices qu’ils offrent à leurs utilisateurs et à la société.

Lire aussi :
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Traduire en termes monétaires les dégâts induits par le recours excessif à l’agrochimie peut sembler une forme de cynisme – une maladie ou une dégradation environnementale ne peuvent être réduites à un seul coût – mais, comme le disent les chercheurs du comité d’orientation du PPR, cela pourrait être un levier majeur du changement. Pour l’heure, et malgré plus de dix années d’échec à faire baisser le recours aux pesticides, le gouvernement semble souhaiter que ces « coûts cachés » demeurent, précisément, cachés.

Stéphane Foucart



Bien évidemment la lecture de cet article sur le site même du journal est une lecture plus riche puisqu’elle permet de cliquer sur de nombreux liens. ;)

Marc
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Re: Phytosanitaires.

Message par Marc » 27 avr. 2019, 23:57

J'aimerai bien savoir ce qu'est devenu l'argent...c'est de l'argent public qui est versé comment et à qui ?

Claude
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Re: Phytosanitaires.

Message par Claude » 01 mai 2019, 21:30

Marc.
L’article contient des liens évidemment absent d’un copié.collé.
Voici l’un d’eux qui pourrait répondre à ta demande :
https://www.cahiersagricultures.fr/arti ... 160188.pdf

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Re: Phytosanitaires.

Message par Claude » 03 mai 2019, 23:47

Un nouveau Plouf, un Canard.
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(Cliquer)
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Re: Phytosanitaires.

Message par Claude » 16 mai 2019, 15:13

Cette tribune d’experts publiés par Le Monde
signale un plan gouvernemental
que personnellement je trouve tardif
pour cultiver sans pesticides
et pointe des manques.

La connaissance des coûts
que génèrent les pesticides
pour la société,
à travers leurs effets sur la santé
et sur l’environnement,
serait décisive
pour mieux orienter les politiques publiques



«
Sur l’impact des pesticides,
la recherche scientifique doit éclairer la décision publique
»

TRIBUNE

Collectif

L’appel à projets annoncé
par le gouvernement le 9 mai ne suffira pas
à couvrir l’ensemble des problématiques liées à l’utilisation de ces produits,
déplore un collectif de près de 260 scientifiques,
qui prônent une gestion plus ambitieuse « au nom du bien commun ».


Publié aujourd’hui à 06h30, mis à jour à 11h03 Temps de Lecture 5 min.


Malgré la multiplication des plans annonçant leur réduction depuis plus d’une décennie, l’utilisation des pesticides en agriculture continue d’augmenter en France. Face à ce constat, le gouvernement lancera début juin le programme prioritaire de recherche « Cultiver et protéger autrement », doté de 30 millions d’euros. Ce dispositif est conçu pour développer des solutions de remplacement agronomiques et technologiques aux pesticides et les déployer ensuite vers les agriculteurs. Mais les travaux sur les impacts des pesticides sur la santé humaine et environnementale et les coûts que ceux-ci impliquent pour la société sont exclus des appels à projets.

Le 9 mai, le gouvernement a annoncé le lancement d’un appel à projets sur les effets des pesticides dans le cadre d’Ecophyto2 +. Doté de seulement 2 millions d’euros, il ne permettra pas de couvrir toutes les problématiques. Pourtant, la connaissance de l’étendue et de la profondeur des impacts des pesticides et la façon dont ils pèsent sur la société est un levier indispensable pour accélérer la transition vers d’autres modes de production, et complémentaire au développement d’alternatives aux pesticides. Pour être à la hauteur des enjeux, une programmation plus ambitieuse est nécessaire.

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De plus en plus de données montrent que les pesticides contribuent pour une grande part à la chute dramatique de la biodiversité, avec des conséquences en chaîne sur les écosystèmes et, comme l’illustre l’exemple des abeilles et autres insectes pollinisateurs, sur l’agriculture elle-même et in fine sur l’alimentation.

Des données probantes existent par ailleurs sur les impacts plus directs des pesticides sur la santé humaine. On sait notamment que certaines pathologies comme les cancers du sang et de la prostate et la maladie de Parkinson sont en surincidence chez les travailleurs agricoles exposés aux pesticides. On sait également que les équipements de protection, pierre angulaire des autorisations de mise sur le marché des pesticides, ont dans la réalité une efficacité relative et limitée et sont souvent inadaptés aux conditions du travail agricole, en particulier concernant la pénibilité et la chaleur.

……

La multi-exposition des travailleurs agricoles ou des riverains à une diversité de pesticides n’est pas prise en compte dans les évaluations des risques. La potabilisation de l’eau ou la fermeture des captages d’eau rendue insalubre engendrent des coûts qui sont facturés aux consommateurs. Dans les territoires d’outre-mer, certaines cultures sont interdites du fait de la pollution des terres par les pesticides. Malgré tous ces éléments, il n’existe encore aucune évaluation précise des coûts que génèrent les pesticides pour la société à travers leurs effets sur la santé et sur l’environnement. La connaissance de ces coûts, au sens large, serait pourtant décisive pour mieux orienter les politiques publiques.

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Les effets des pesticides sont complexes à documenter. D’une part parce qu’ils se conjuguent à d’autres facteurs et processus pouvant impacter la santé humaine et l’environnement, et d’autre part parce qu’ils peuvent être différés de plusieurs dizaines d’années. La question de leur évaluation s’adresse à de nombreuses disciplines scientifiques, dont la toxicologie, l’épidémiologie, l’écotoxicologie, la chimie, l’écologie, l’agronomie, la nutrition, l’ergonomie et les sciences humaines et sociales.

Quantifier les risques

La recherche scientifique doit travailler sur tous les fronts pour synthétiser les connaissances existantes et en produire de nouvelles. Elle doit aider à mieux comprendre l’état de santé des travailleurs agricoles exposés, en prenant en compte le développement de la sous-traitance et du travail saisonnier et les degrés réels d’exposition.

Elle doit quantifier les effets des pesticides sur les populations humaines riveraines, mais aussi sur celles, plus éloignées, qui sont touchées par la contamination des nappes phréatiques et de l’air, ainsi que par les résidus de pesticides dans l’alimentation.

Elle doit évaluer les coûts de prise en charge des malades pour les systèmes sociaux de santé. Elle doit quantifier les impacts sur l’ensemble des êtres vivants, sur la perte des services écosystémiques (telle la pollinisation) induits et son incidence sur la santé humaine. Elle doit permettre d’améliorer les critères d’évaluation des risques présentés par des pesticides en prenant en compte les avancées des connaissances sur leurs effets possibles sur le métabolisme, l’épigénétique et les perturbations endocriniennes.

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Les travaux doivent aussi permettre d’analyser les processus de construction sociale de l’ignorance et du déni, et de mettre au jour les phénomènes de visibilisation ou d’invisibilisation des savoirs autour des pesticides et de leurs effets. Ils doivent informer sur la façon dont les controverses et le débat public sont alimentés et cadrés par des acteurs aux intérêts divergents et aux ressources inégales.

La recherche publique doit apporter des preuves scientifiques et éclairer la décision publique sur les plans technique (coûts d’acquisition des preuves, niveau minimal de preuves pouvant soutenir la décision), éthique (valeur de la vie humaine et de la biodiversité, justice environnementale) et démocratique (accès à ces preuves par différents groupes sociaux). Elle peut ainsi renforcer les outils à disposition de l’éducation et du conseil pour induire des changements de pratiques significatifs.

L’analyse des effets et des impacts des pesticides doit être portée par la recherche publique, en toute indépendance et transparence, au service des citoyens et citoyennes et au nom du bien commun de la préservation de la nature et de ses écosystèmes. A travers des approches pluridisciplinaires et participatives, tant sur les questions que sur les méthodes, la recherche doit se saisir de tous ces enjeux si elle veut pouvoir constituer un réel appui pour une transition vers une réduction significative de l’usage des pesticides
.

Premiers signataires : Isabelle Baldi, médecine du travail, université de Bordeaux ; Philippe Baret, agronomie, université catholique de Louvain (Belgique) ; Marion Desquilbet, économie, INRA ; Eve Fouilleux, sciences politiques, CNRS ; Alain Garrigou, ergonomie, université de Bordeaux ; Pierre-Henri Gouyon, génétique, MNHN-CNRS ; Laurence Huc, toxicologie, INRA ; Jean-François Humbert, écologie aquatique, INRA ; François Léger, agronomie, AgroParisTech ; Bernard Salles, toxicologie, université de Toulouse ; Olivier de Schutter, rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à l’alimentation (2008-2014), université catholique de Louvain (Belgique

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