Pièges de la grande distribution (par un "repenti")

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Claude
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Pièges de la grande distribution (par un "repenti")

Message par Claude » 02 janv. 2019, 23:44


PLANÈTE

Christophe Brusset : « Les grands industriels fabriquent des produits pollués, nocifs et le cachent »

Tromperies sur les étiquettes, additifs cachés… Christophe Brusset, ancien industriel de l’agroalimentaire, revient sur les pièges à éviter de la grande distribution.

Propos recueillis par Solène Lhénoret Publié aujourd’hui à 11h51, mis à jour à 12h31

L’assiette en tête.
Ancien industriel de l’agroalimentaire, Christophe Brusset dit avoir fourni pendant plus de vingt ans des grandes surfaces en cèpes pleins d’asticots, en miel composé de sirop de fructose, en piments broyés avec des crottes de rat… Trois ans après avoir écrit Vous êtes fous d’avaler ça ! (Flammarion), il raconte dans un livre paru en octobre, Et maintenant, on mange quoi ?, les coulisses de la fabrication des aliments industriels et analyse pour le consommateur les techniques de marketing, les tromperies d’étiquettes et les additifs cachés.
Lire : Qu’est-ce qu’on mange en France ? Votre assiette décortiquée
Vous avez été industriel de l’agroalimentaire pendant plus de vingt ans. Qu’est-ce qui vous a décidé à quitter ce milieu ?

Christophe Brusset : J’ai commencé comme ingénieur, puis acheteur, négociateur et directeur des achats. Pendant plus de vingt ans, j’ai acheté des produits alimentaires et des emballages pour les usines qui fabriquent des produits industriels transformés. Cela m’a permis de voir beaucoup de produits différents : miel, épices, surgelés, légumes secs, coulis, produits de pâtisserie, sauces… J’ai essayé de changer plusieurs fois d’entreprise pour voir si l’herbe était plus verte ailleurs, mais malheureusement non. Je n’avais plus envie de continuer dans ce système. Je ne consommais plus du tout les produits que je vendais. A ce moment-là, il y a eu le scandale des lasagnes, ce qu’on a appelé « l’affaire Findus », où des entreprises ont remplacé du bœuf par du cheval pour baisser les prix. Cette fraude avait déjà été pratiquée plusieurs fois par le passé, notamment avec des raviolis Leader Price, mais il n’y avait jamais eu de retentissement, l’affaire avait été étouffée. Cela m’a fait comprendre que les consommateurs n’avaient plus envie de se laisser faire. Les mentalités avaient changé.

Il y avait à nouveau une volonté d’étouffer les choses
Puis j’ai entendu les politiques et industriels dire : « Ça s’est passé à l’étranger, ce n’est pas en France », « Ce n’est pas dangereux »… Il y avait à nouveau une volonté d’étouffer les choses. J’ai eu envie de raconter ce que j’avais vu, ce qu’il se passait, et qu’il y aurait à nouveau des scandales. Effectivement, il y a eu le scandale des œufs contaminés au Fipronil, l’affaire Lactalis maintenant. L’industrie ne se remet pas du tout en cause. Et si des gens comme moi n’en parlent pas, les consommateurs n’ont pas moyen de comprendre ce qu’il se passe en réalité, comment marche le lobbyisme, comment l’industrie place des scientifiques à sa solde au niveau de l’agence européenne de sécurité sanitaire, comment on fait pour corrompre les gens qui sont dans les comités d’évaluation des pesticides et des additifs… Tout ça, personne ne l’explique.

Pesticides, additifs, conservateurs… vous expliquez dans votre livre pourquoi les industriels utilisent ces produits. Avez-vous constaté une dégradation de la qualité ?

Quand j’ai commencé ma carrière il y a une vingtaine d’années, on avait encore des produits relativement simples, traditionnels, avec moins d’additifs. Mais la qualité des produits s’est clairement dégradée. Au début, on faisait du ketchup avec du concentré de tomates français, et puis on est passé à du concentré de tomates chinois, toujours moins cher.
Les colorants sont là parce que le produit est moche. Les exhausteurs de goût, parce que le produit n’est pas bon
On a eu une grosse pression de la grande distribution sur les prix, puisque depuis vingt ans, elle ne communique que là-dessus. Pour baisser les prix, l’industriel utilise des produits de mauvaise qualité, qu’il rend présentables grâce aux additifs. Mais, en termes nutritifs, ces additifs sont parfaitement inutiles au consommateur : les colorants, par exemple, sont juste là parce que le produit est moche. Les exhausteurs de goût, comme le glutamate, parce que le produit n’est pas bon. Ou lorsque beaucoup d’eau est injectée au produit comme dans le jambon pour qu’il pèse plus lourd, on ajoute des texturants, des émulsifiants, des protéines de soja, afin que l’eau reste à l’intérieur.

Pourtant, la première cause de mortalité au monde aujourd’hui, c’est la malbouffe : obésité, diabète, maladies cardiovasculaires, problèmes rénaux, surtension… Les dernières études de l’Inserm assurent que si vous augmentez de 10 % la part de produits « ultratransformés » dans votre alimentation, vous augmentez de 12 % votre risque de cancer. Donc les grands industriels fabriquent des produits déséquilibrés, pollués, nocifs, et le cachent.
Lire : Les aliments « ultratransformés » favoriseraient le cancer
Ensuite, l’industriel ajoute sur ses emballages des mentions marketing qui sont souvent inutiles. « Qualité garantie », « recette originale », « produit élu saveur de l’année », « viande sélectionnée par nos bouchers »… cela ne veut rien dire. La viande n’est pas sélectionnée par un boucher mais par l’industriel, qui va sélectionner la viande la moins chère. Toutes ces allégations sont de fausses promesses. Ces mentions sont trompeuses et ne devraient pas être autorisées. En plus, ça vient en concurrence avec des mentions légales, comme un « produit fermier ».

Quelle est la plus grosse arnaque dont vous avez eu connaissance ?

Le miel. On sait depuis des dizaines d’années qu’un tiers du miel en France est frauduleux, essentiellement du miel chinois. Les fraudeurs que j’ai rencontrés en Chine étaient mieux équipés que les laboratoires en France. Aujourd’hui, les fraudes sont scientifiques et faites intelligemment. Pendant des années, j’ai acheté des centaines de tonnes de faux miel chinois un peu plus d’1 euro le kilo, qui leur coûtait 30 ou 40 centimes à produire.

Que Choisir a fait des contrôles en 2014, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en 2015, le parlement européen en 2017. On arrive toujours à la même conclusion : le miel importé de Chine est frauduleux. Mais on ne fait rien. Car, moyennant rétribution, il n’y a rien de plus facile que de changer une origine, le COO (Certificate of Origin), c’est juste un papier. Un de mes fournisseurs allemands par exemple, qui était l’un des plus gros importateurs de miel au monde, avait un bureau aux Etats-Unis, où il faisait venir du miel chinois. Il l’envoyait au Vietnam ou en Amérique du sud pour faire changer l’origine et le faisait réexpédier aux Etats-Unis. Ça a été un énorme scandale là-bas.

Vous faites un portrait assez sombre des politiques. Que pensez-vous de la loi agriculture et alimentation adoptée le 30 octobre ?

C’est une loi complètement vide. Les quelques articles un peu sensés, qui déplaisaient à l’industrie, ont été éliminés. Par exemple, l’article 43 disait que, pour le miel, on devait indiquer les origines. Or le Conseil constitutionnel a jugé cet article contraire à la Constitution. C’est un exemple emblématique. On se moque d’informer le consommateur. On préfère permettre à l’industriel de continuer à vendre du miel chinois de mauvaise qualité. Il y a 211 experts au sein de l’Autorité européenne de sécurité des aliments et, selon un rapport de l’ONG Corporate Europe Observatory, près de la moitié de ces experts seraient payés par l’industrie. Donc l’industrie fait du lobby, paie des experts, et, au final, les lois sont faites sur mesure pour l’industrie. C’est un système de corruption organisé, qui est accepté par les politiques, voire encouragé, parce qu’il y a beaucoup de retombées financières.

Un des objectifs de la loi était de mieux rémunérer nos producteurs et de mieux partager la marge… Or, on aboutit à quoi ? Les supermarchés auront une marge minimum de 10 % garantie, par exemple sur des produits comme Nutella et Ferrero. En quoi assurer une marge de 10 % sur ces produits-là va bénéficier aux producteurs français ? On ponctionne les consommateurs de 5 à 7 milliards d’euros de pouvoir d’achat, qu’on va donner aux supermarchés. C’est scandaleux.

Dans le même genre, le projet de loi pour rendre obligatoire l’étiquetage Nutri-Score a été refusé en mai 2018 par les parlementaires français. Cela aurait permis aux consommateurs d’avoir immédiatement une idée de la qualité du produit. Aujourd’hui, les fabricants de produits de mauvaise qualité essayent de noyer le poisson en vous mettant trop d’informations, de manière à ce que vous ne puissiez plus vous y retrouver : les ingrédients, des noms compliqués, le tableau nutritionnel, par 100 g, par portion, par jour… Avec Nutri-Score, on prend tous ces éléments et on les simplifie avec un code couleur : vert, orange, rouge. C’est ce que font Yuka ou Open Food Facts ; ces applis ne font que pallier l’incompétence et la corruption de nos politiques.

Quels sont les conseils que vous donneriez en priorité au consommateur pour éviter les pièges de la grande distribution ?

Le consommateur doit fuir absolument les aliments « ultratransformés » qui ont des listes d’ingrédients à rallonge. Des ingrédients avec des « E quelque chose » ou des noms qu’on ne comprend pas.

Ensuite, je dirais au consommateur de faire confiance à son bon sens et d’acheter les produits les plus bruts et bio possible. Il peut faire confiance aux mentions : « bio », « label rouge »… qui sont des certifications officielles avec des normes contraignantes. De même pour les AOC, les AOP, les IGP.

Dernier conseil, se remettre un peu à cuisiner et se réapproprier la nourriture. Parce que, quand on fait son plat, on n’ajoute pas d’additifs, on met la dose de sel nécessaire, on peut choisir des ingrédients bio. En faisant sa nourriture, on s’éduque et on a en général des produits plus sains.

Et maintenant on mange quoi ?, Christophe Brusset, Editions Flammarion.
Lire : L’alimentation bio réduit significativement les risques de cancer

Notre rubrique « L’assiette en tête »
es scandales sanitaires aux régimes sans gluten, en passant par la question des additifs, des perturbateurs endocriniens ou encore de la maltraitance animale… le souci de connaître l’origine et le mode de production de ce que l’on mange n’a jamais été aussi présent. En France et dans le monde, les initiatives se multiplient pour reprendre le pouvoir sur ce que nous mangeons : notre assiette, nous l’avons tous plus que jamais en tête, et c’est ce que cette rubrique raconte.
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Re: Pièges de la grande distribution (par un "repenti")

Message par PatriciAndree » 03 janv. 2019, 13:09

Merci Claude, je vais le lire en plusieurs fois car j'ai du mal à lire sur écran.

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Re: Pièges de la grande distribution (par un "repenti")

Message par Chichinette 11 » 03 janv. 2019, 13:34

http://yelims2.free.fr/Forum/Forum70.gif Comme-pareil.
Quand je vois toutes les tartines qui sont postées depuis un moment, je passe mon chemin, même pas que j'essaie de lire en diagonale.

singe
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Re: Pièges de la grande distribution (par un "repenti")

Message par singe » 04 janv. 2019, 10:54

Ça confirme ce que je pense - et fais - depuis longtemps : je fais absolument Tout à la maison ... conserves, légumes, soupes , desserts, ... je n’achete Jamais de choses toutes prêtes à réchauffer, même pas en surgelés - au grand dam de monz’homme qui a fait la cuisine en décembre (du fait de ma quasi immobilité) , et qui aurait bien voulu s’epargner La « corvée » de la cuisine ! Et non, il a fait des pot au feu , des légumes ... au moins il s’est rendu compte que ce n’etait pas une sinécure, certes, mais je n’ai pas lâché !
Et des pâtes bio, quand il en avait marre!

Claude
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Re: Pièges de la grande distribution (par un "repenti")

Message par Claude » 04 janv. 2019, 13:47

Pour Patricia.

J'ai agrandi le taille des caractères. Est-ce plus facile à lire ainsi ?
.
Claude a écrit :
02 janv. 2019, 23:44

PLANÈTE

Christophe Brusset : « Les grands industriels fabriquent des produits pollués, nocifs et le cachent »

Tromperies sur les étiquettes, additifs cachés… Christophe Brusset, ancien industriel de l’agroalimentaire, revient sur les pièges à éviter de la grande distribution.

Propos recueillis par Solène Lhénoret Publié aujourd’hui à 11h51, mis à jour à 12h31

L’assiette en tête.
Ancien industriel de l’agroalimentaire, Christophe Brusset dit avoir fourni pendant plus de vingt ans des grandes surfaces en cèpes pleins d’asticots, en miel composé de sirop de fructose, en piments broyés avec des crottes de rat… Trois ans après avoir écrit Vous êtes fous d’avaler ça ! (Flammarion), il raconte dans un livre paru en octobre, Et maintenant, on mange quoi ?, les coulisses de la fabrication des aliments industriels et analyse pour le consommateur les techniques de marketing, les tromperies d’étiquettes et les additifs cachés.



Vous avez été industriel de l’agroalimentaire pendant plus de vingt ans. Qu’est-ce qui vous a décidé à quitter ce milieu ?

Christophe Brusset : J’ai commencé comme ingénieur, puis acheteur, négociateur et directeur des achats. Pendant plus de vingt ans, j’ai acheté des produits alimentaires et des emballages pour les usines qui fabriquent des produits industriels transformés. Cela m’a permis de voir beaucoup de produits différents : miel, épices, surgelés, légumes secs, coulis, produits de pâtisserie, sauces… J’ai essayé de changer plusieurs fois d’entreprise pour voir si l’herbe était plus verte ailleurs, mais malheureusement non. Je n’avais plus envie de continuer dans ce système. Je ne consommais plus du tout les produits que je vendais. A ce moment-là, il y a eu le scandale des lasagnes, ce qu’on a appelé « l’affaire Findus », où des entreprises ont remplacé du bœuf par du cheval pour baisser les prix. Cette fraude avait déjà été pratiquée plusieurs fois par le passé, notamment avec des raviolis Leader Price, mais il n’y avait jamais eu de retentissement, l’affaire avait été étouffée. Cela m’a fait comprendre que les consommateurs n’avaient plus envie de se laisser faire. Les mentalités avaient changé.

Il y avait à nouveau une volonté d’étouffer les choses

Puis j’ai entendu les politiques et industriels dire : « Ça s’est passé à l’étranger, ce n’est pas en France », « Ce n’est pas dangereux »… Il y avait à nouveau une volonté d’étouffer les choses. J’ai eu envie de raconter ce que j’avais vu, ce qu’il se passait, et qu’il y aurait à nouveau des scandales. Effectivement, il y a eu le scandale des œufs contaminés au Fipronil, l’affaire Lactalis maintenant. L’industrie ne se remet pas du tout en cause. Et si des gens comme moi n’en parlent pas, les consommateurs n’ont pas moyen de comprendre ce qu’il se passe en réalité, comment marche le lobbyisme, comment l’industrie place des scientifiques à sa solde au niveau de l’agence européenne de sécurité sanitaire, comment on fait pour corrompre les gens qui sont dans les comités d’évaluation des pesticides et des additifs… Tout ça, personne ne l’explique.

Pesticides, additifs, conservateurs… vous expliquez dans votre livre pourquoi les industriels utilisent ces produits. Avez-vous constaté une dégradation de la qualité ?

Quand j’ai commencé ma carrière il y a une vingtaine d’années, on avait encore des produits relativement simples, traditionnels, avec moins d’additifs. Mais la qualité des produits s’est clairement dégradée. Au début, on faisait du ketchup avec du concentré de tomates français, et puis on est passé à du concentré de tomates chinois, toujours moins cher.
Les colorants sont là parce que le produit est moche. Les exhausteurs de goût, parce que le produit n’est pas bon
On a eu une grosse pression de la grande distribution sur les prix, puisque depuis vingt ans, elle ne communique que là-dessus. Pour baisser les prix, l’industriel utilise des produits de mauvaise qualité, qu’il rend présentables grâce aux additifs. Mais, en termes nutritifs, ces additifs sont parfaitement inutiles au consommateur : les colorants, par exemple, sont juste là parce que le produit est moche. Les exhausteurs de goût, comme le glutamate, parce que le produit n’est pas bon. Ou lorsque beaucoup d’eau est injectée au produit comme dans le jambon pour qu’il pèse plus lourd, on ajoute des texturants, des émulsifiants, des protéines de soja, afin que l’eau reste à l’intérieur.

Pourtant, la première cause de mortalité au monde aujourd’hui, c’est la malbouffe : obésité, diabète, maladies cardiovasculaires, problèmes rénaux, surtension… Les dernières études de l’Inserm assurent que si vous augmentez de 10 % la part de produits « ultratransformés » dans votre alimentation, vous augmentez de 12 % votre risque de cancer. Donc les grands industriels fabriquent des produits déséquilibrés, pollués, nocifs, et le cachent.



Ensuite, l’industriel ajoute sur ses emballages des mentions marketing qui sont souvent inutiles. « Qualité garantie », « recette originale », « produit élu saveur de l’année », « viande sélectionnée par nos bouchers »… cela ne veut rien dire. La viande n’est pas sélectionnée par un boucher mais par l’industriel, qui va sélectionner la viande la moins chère. Toutes ces allégations sont de fausses promesses. Ces mentions sont trompeuses et ne devraient pas être autorisées. En plus, ça vient en concurrence avec des mentions légales, comme un « produit fermier ».

Quelle est la plus grosse arnaque dont vous avez eu connaissance ?

Le miel. On sait depuis des dizaines d’années qu’un tiers du miel en France est frauduleux, essentiellement du miel chinois. Les fraudeurs que j’ai rencontrés en Chine étaient mieux équipés que les laboratoires en France. Aujourd’hui, les fraudes sont scientifiques et faites intelligemment. Pendant des années, j’ai acheté des centaines de tonnes de faux miel chinois un peu plus d’1 euro le kilo, qui leur coûtait 30 ou 40 centimes à produire.

Que Choisir a fait des contrôles en 2014, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en 2015, le parlement européen en 2017. On arrive toujours à la même conclusion : le miel importé de Chine est frauduleux. Mais on ne fait rien. Car, moyennant rétribution, il n’y a rien de plus facile que de changer une origine, le COO (Certificate of Origin), c’est juste un papier. Un de mes fournisseurs allemands par exemple, qui était l’un des plus gros importateurs de miel au monde, avait un bureau aux Etats-Unis, où il faisait venir du miel chinois. Il l’envoyait au Vietnam ou en Amérique du sud pour faire changer l’origine et le faisait réexpédier aux Etats-Unis. Ça a été un énorme scandale là-bas.

Vous faites un portrait assez sombre des politiques. Que pensez-vous de la loi agriculture et alimentation adoptée le 30 octobre ?

C’est une loi complètement vide. Les quelques articles un peu sensés, qui déplaisaient à l’industrie, ont été éliminés. Par exemple, l’article 43 disait que, pour le miel, on devait indiquer les origines. Or le Conseil constitutionnel a jugé cet article contraire à la Constitution. C’est un exemple emblématique. On se moque d’informer le consommateur. On préfère permettre à l’industriel de continuer à vendre du miel chinois de mauvaise qualité. Il y a 211 experts au sein de l’Autorité européenne de sécurité des aliments et, selon un rapport de l’ONG Corporate Europe Observatory, près de la moitié de ces experts seraient payés par l’industrie. Donc l’industrie fait du lobby, paie des experts, et, au final, les lois sont faites sur mesure pour l’industrie. C’est un système de corruption organisé, qui est accepté par les politiques, voire encouragé, parce qu’il y a beaucoup de retombées financières.

Un des objectifs de la loi était de mieux rémunérer nos producteurs et de mieux partager la marge… Or, on aboutit à quoi ? Les supermarchés auront une marge minimum de 10 % garantie, par exemple sur des produits comme Nutella et Ferrero. En quoi assurer une marge de 10 % sur ces produits-là va bénéficier aux producteurs français ? On ponctionne les consommateurs de 5 à 7 milliards d’euros de pouvoir d’achat, qu’on va donner aux supermarchés. C’est scandaleux.

Dans le même genre, le projet de loi pour rendre obligatoire l’étiquetage Nutri-Score a été refusé en mai 2018 par les parlementaires français. Cela aurait permis aux consommateurs d’avoir immédiatement une idée de la qualité du produit. Aujourd’hui, les fabricants de produits de mauvaise qualité essayent de noyer le poisson en vous mettant trop d’informations, de manière à ce que vous ne puissiez plus vous y retrouver : les ingrédients, des noms compliqués, le tableau nutritionnel, par 100 g, par portion, par jour… Avec Nutri-Score, on prend tous ces éléments et on les simplifie avec un code couleur : vert, orange, rouge. C’est ce que font Yuka ou Open Food Facts ; ces applis ne font que pallier l’incompétence et la corruption de nos politiques.

Quels sont les conseils que vous donneriez en priorité au consommateur pour éviter les pièges de la grande distribution ?

Le consommateur doit fuir absolument les aliments « ultratransformés » qui ont des listes d’ingrédients à rallonge. Des ingrédients avec des « E quelque chose » ou des noms qu’on ne comprend pas.

Ensuite, je dirais au consommateur de faire confiance à son bon sens et d’acheter les produits les plus bruts et bio possible. Il peut faire confiance aux mentions : « bio », « label rouge »… qui sont des certifications officielles avec des normes contraignantes. De même pour les AOC, les AOP, les IGP.

Dernier conseil, se remettre un peu à cuisiner et se réapproprier la nourriture. Parce que, quand on fait son plat, on n’ajoute pas d’additifs, on met la dose de sel nécessaire, on peut choisir des ingrédients bio. En faisant sa nourriture, on s’éduque et on a en général des produits plus sains.

Et maintenant on mange quoi ?, Christophe Brusset, Editions Flammarion
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Notre rubrique « L’assiette en tête »
Des scandales sanitaires aux régimes sans gluten, en passant par la question des additifs, des perturbateurs endocriniens ou encore de la maltraitance animale… le souci de connaître l’origine et le mode de production de ce que l’on mange n’a jamais été aussi présent. En France et dans le monde, les initiatives se multiplient pour reprendre le pouvoir sur ce que nous mangeons : notre assiette, nous l’avons tous plus que jamais en tête, et c’est ce que cette rubrique raconte.
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Re: Pièges de la grande distribution (par un "repenti")

Message par Claude » 04 janv. 2019, 14:02

Les deux quotidiens que je suis ont développé depuis un certain temps des rubriques régulières et de plus en plus étoffées comme Le Fil Vert. Ces rubriques fourmillent d'infos intéressantes pour nous. À tel point que je pourrais vous en communiquer un ou deux par Jour. Et nourrir une sorte de base de données. Mais je me retiens ! :lol:

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Re: Pièges de la grande distribution (par un "repenti")

Message par Chichinette 11 » 05 janv. 2019, 00:03

Tu n'étais pas obligé de le recopier une seconde fois, tu pouvais tout aussi bien modifier ton premier message.

Ceci dit, je ne sais pas si pour Patricia c'est une question de vue mais pour ma part la taille des caractères n'y change rien et même, plus c'est écrit gros plus je me sens agressée (sans doute en lien avec la convention qui dit qu'écrire en majuscules = crier ).

Je déteste lire des textes très longs sur écran, sauf au cas où le texte est entrecoupé de photos ou de dessins, comme des respirations.
Je ne suis pas près d'investir dans une liseuse, du texte pour moi ça doit être sur papier, point barre.

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Re: Pièges de la grande distribution (par un "repenti")

Message par Marie_May » 06 janv. 2019, 18:30

Merci Claude pour ce texte qui EST intéressant. Il nous redit ce que la plupart d'entre nous savons déjà, mais qu'il est toujours bon de nous rappeler.

PatriciAndree
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Re: Pièges de la grande distribution (par un "repenti")

Message par PatriciAndree » 07 janv. 2019, 08:13

La taille des caractère compte dans mes difficultés à lire sur écran ainsi que l'importance plus ou moins grande des interlignes. Mais ma que j'ai l'impression que lire sur papier est de toute façon plus agréable que sur écran, je peux incliner le livre, la revue comme je veux. Difficile de manipuler un écran d'ordi.

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Re: Pièges de la grande distribution (par un "repenti")

Message par Claude » 07 janv. 2019, 10:43

Je lis bcp plus sur tablette … et couché !
La tablette pèse moins sur le ventre qu'un gros livre qu'il faut maintenir ouvert à deux mains.

:lol: :mrgreen:

Voilà vous savez tout. Je ne.ai plus d'intimité.

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Re: Pièges de la grande distribution (par un "repenti")

Message par Chichinette 11 » 08 janv. 2019, 23:49

Faire avaler n'importe quoi aux consommateurs ne date pas de notre génération. Je viens de découvrir ceci, numérisé dans Gallica :
Pierre Delcourt (1852-1931), journaliste et écrivain, passionné par l’histoire du commerce ..., a publié en 1888 un livre intitulé « ce qu’on mange à Paris ». Il ne s’agit pas d’un guide de meilleures tables de la capitale mais d’une longue liste des fraudes alimentaires observées à Paris.
Entrer directement dans le vif du sujet

L'intégrale de "Ce qu’on mange à Paris"

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Re: Pièges de la grande distribution (par un "repenti")

Message par Marie_May » 13 janv. 2019, 08:08

Pas réussi à lire ton lien, Chichi. Mais j'imagine les horreurs qu'il raconte...

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Re: Pièges de la grande distribution (par un "repenti")

Message par Chichinette 11 » 13 janv. 2019, 09:21

Bizarre que tu n'arrives pas à l'ouvrir mais bon, je l'ai parcouru quasiment en entier (en étalant sur plusieurs jours ) et je n'imaginais pas qu'on puisse connaître et utiliser autant de "produits chimiques" dans la vie courante à cette époque là.
Les poulets lavés au chlore ne sont pas une invention récente http://i.les-forums.com/ic/ic37.gif

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